Voici la suite du résumé du dispositif MUSEOSTAT du billet de la semaine dernière concernant les musées du service public. La gratuité, nous le verrons, sert la Communication des villes ou des régions, mais peu la qualité musées et la satisfaction de leurs publics.
I – BILAN DE L’EXPERIMENTATION DE LA GRATUITE
Les sept musées nationaux du MCC qui avaient expérimenté la gratuité complète des
collections permanentes pendant le 1er semestre 2008 avec de très fortes hausses
enregistrées par rapport à 2007, ont connu des baisses plus ou moins substantielles dès que cette gratuité a pris fin en 2009 :
– musé Magnin à Dijon (-11 %),
– musée de la Renaissance à Ecouen (-12%)
– musée du Moyen-Age à Paris(-13%),
– musée du château de Pau (-15%),
– musée de l’Archéologie nationale à Saint Germain en Laye (-17%),
– musée Adrien Dubouché à Limoges et musée Guimet (-31% chacun).
En revanche, la baisse de fréquentation dans quelques musées parisiens, franciliens et de la Côte d’Azur s’explique d’abord par une moindre présence des touristes étrangers :
– musée Rodin (avec son annexe de Meudon) : -8%,
– château de Fontainebleau : -10%,
– Malmaison : -8%
– musée des Arts décoratifs : -7% ou musée Picasso à Vallauris : -16%.
Cependant, à Nice, la baisse de -8% au musée Chagall s’inscrit dans un contexte où les musées de la Ville sont gratuits.
a) Musées nationaux : désormais, toute catégorie d’exonération confondue, la part des entrées gratuites représente 50 % de la fréquentation des collections permanentes des musées nationaux du MCC. En 2009, c’est la mesure de gratuité mise en place à destination des jeunes de 18 à 25 ans et des enseignants du Primaire et du Secondaire dans l’ensemble des musées nationaux qui en constitue l’une des raisons. Ainsi, entre le début avril et la fin décembre, le nombre total de visites gratuites imputables aux mesures de gratuité du 4 avril est établie à 1 523 156 visites dans les musées nationaux qui sont sous tutelle du ministère de la culture
b) Musées de France : traduisant l’impact cumulé de ces diverses formules de gratuité offertes par les collectivités publiques, le nombre d’entrées gratuites dans les musées de France en 2009 s’établit à 23 848 668, et représente un peu plus de 42% de la fréquentation totale.
Sur une échelle de cinq ans, le volume des entrées gratuites a ainsi progressé de pratiquement 60%, tandis que celui des entrées payantes ne l’aura fait que de 7%. C’est la part grandissante des entrées gratuites qui explique le mieux l’augmentation globale de la fréquentation sur la même période.
II – LA GRATUITE ATTIRE DE NOUVEAUX VISITEURS, MAIS L’EFFET EST PROVISOIRE
Nous le voyons ci-dessus que « C’est la part grandissante des entrées gratuites qui explique le mieux l’augmentation globale de la fréquentation sur la même période ».
– Disposant des objectifs et des résultats de plusieurs tentatives de «musées gratuits »depuis 30 ans, nous sommes convaincue depuis longtemps que la gratuité, qui revient tout de même cher (subvention publique pour « compenser « le déficit de billetterie), est inefficace pour trois raisons :
1 – Si le musée est gratuit, pourquoi et comment chercher de nouveaux publics ?
La première raison est que la grande majorité des directeurs de musées, dès l’annonce de cette « gratuité », font beaucoup moins effort pour améliorer la fréquentation de leurs musées si celle-ci ne « compte » plus, n’est plus un indicateur de la bonne santé du musée dont ils ont la responsabilité ;
les études des publics ont moins de raison d’exister, d’ailleurs, et la conséquence du suivi de la connaissance des visiteurs est redoutable: ne connaissant plus les profils de ceux qui viennent, comment attirer ceux qui ne viennent pas ou peu, et que l’on ne peut repérer que grâce à leur absence dans les études d’observation ?
– Même forme de « laisser-aller » des tutelles, en général, qui décident de la gratuité surtout pour communiquer sur leur politique culturelle, mais ne sont pas pour autant partantes pour investir sur de grands projets s’ils n’ont pas la certitude que de « nouveaux publics » les fréquenteront.
2 – La gratuité appauvrit la qualité et le rayonnement des musées
Les musées privés (France, étranger) ou les jeunes Etablissements Publics du Louvre, du Musée Picasso de Paris ou d’Orsay, qui ont gagné leur autonomie, ont une sorte d’obligation de résultats. Ils doivent en effet créer des fonds propres ( Billetterie, notamment) ou chercher du mécénat ou des partenariats ; comment convaincre des partenaires si l’on n’a pas de bons résultats en terme d’évolution de la fréquentation ? En effet la qualité des expositions, mais aussi des travaux ou extensions du bâtiment, la restauration des œuvres et des objets, le recrutement de personnels très qualifiés, bref, toute la vie du musée dépend de sommes de plus en plus importantes, chaque année, qu’il faut donc savoir mobiliser.
Loin de se limiter à un critère quantitatif, la question de la gratuité engage donc, à notre avis, toute la qualité de la conservation et de la production des musées, sur le long terme. Le travail de fond (Collections, recherche, restauration…) sera le premier à en pâtir.
3 –. Place de la gratuité dans le plaisir de la visite
– La seconde raison est que tout un arsenal de programmes spécifiques, de dispositifs ou de projets interministériels existent, très variés, pour accueillir l’ensemble des les visiteurs potentiels (Politique de la Ville ; milieu ruraux ; différents handicaps physiques; jeunes…) et que ces programmes font beaucoup mieux, qualitativement, que la seule gratuité de l’entrée, qui ne peut être qu’incitative. La gratuité fait d’ailleurs partie, si nécessaire, de l’accueil de ces visiteurs peu habitués. Et elle fait partie d’un tout, qui est la modulation tarifaire et horaire, très intéressante à mettre en œuvre.
– Mais un musée gratuit, si l’on est mal accueilli, si aucun service n’existe, et surtout si n’y comprend pas ce que l’on veut nous montrer (Présentation faite par des chercheurs, non évaluée ; ou textes et descriptions en jargons de scientifiques, d’archéologues, de spécialistes d’’art contemporain, etc. ), quel intérêt ?
– Mieux vaut donc renouveler la présentation des œuvres et des objets, pour que le plaisir, première porte de la compréhension, soit au rendez-vous musées/ comportements de leurs publics.
– Une preuve ? Tous les musées, et heureusement ils sont très nombreux, qui font des efforts, accueillent avec convivialité leurs visiteurs, les font participer aux contenus (Interactivité, co-création…) connaissent une amélioration de leur fréquentation.
– En conclusion, la gratuité des musées fait très plaisir à ceux qui les fréquentent déjà, ils en profiteront pour y aller plus souvent. Mais elle ne peut fabriquer pas des « musées pour tous » (démocratisation) , ou seulement à la marge, si l’on considère l’ensemble des habitants d’une ville, d’un département et d’une région.
4 – La hausse de fréquentation pour les touristes : les touristes profiteront de cet effet d’aubaine, grâce à leurs relais d’information ( de l’Hôtel local aux Tour Opérateurs) alors qu’ils sont prêts à payer 5 ou 10€, comme pour le reste de leurs loisirs culturels (Cinéma ou théâtre, spectacle de danse ou musiques actuelles, beaucoup plus chers, d’ailleurs!) ou non culturels, des matchs de foot à Disneyland.
Notons au passage que les touristes étrangers, qui payent presque partout dans les musées du monde, s’attendent donc à payer en France. De plus, la somme à débourser ne représente qu’epsilon par rapport au coût de leur transport et de leur séjour (hébergement, restauration, autres activités).
CONCLUSION
MUSEOSTAT , enquête statistique « donne une idée » de la fréquentation « en général », ce qui était sa mission lors de sa création (années 90).C’est un meilleur baromètre pour les musées qui appartiennent à l’Etat, mais ceux-ci sont si différents que des études complémentaires, notamment au niveau local, seront nécessaires pour « comprendre » les chiffres données par le baromètre Museostat.
Pour connaitre les visiteurs, et surtout pour renouveler la fréquentation ou la développer, d’autres outils sont évidemment nécessaires. D’autres études, d’autres process existent pour obtenir de bonnes réponses aux questions essentielles que sont : Qu’est-ce qu’une « bonne politique des publics ? »;« Comment évaluer les comportements des visiteurs ? Comment renforcer l’attractivité touristique de notre musée? Comment faire réseau entre établissements culturels ou avec les organismes du Tourisme? Pourquoi seulement 30% des conservateurs s’intéressent-ils réellement la fréquentation ? Quelle formation pour les 70% restants ?
Nous souhaiterons enfinn pour notre part, quelques améliorations pour ce baromètre, comme par exemple :
1 – Pour que les pros et les élus puissent mieux apprécier leur fréquentation, il vaudrait mieux compter le nombre de visiteurs et non celui des visites. Le même visiteur fidèle peut retourner plusieurs fois dans un même musée mais ne devrait être compté qu’une seule fois ; le nombre de visiteurs n’est donc jamais le même que celui des visites;
2 – Rapprocher, dans certains tableaux statistiques, le nombre de visiteurs par rapport au potentiel de la ville ou de la région (nombre d’habitants ; nombre de scolaires ou d’enfants ; flux touristique, ou nombre et provenance des arrivées touristiques).
3 – Cette enquête pourrait aussi, à titre de « comparaison incitative », indiquer la fréquentation du site public ou privé le « plus visité » de la région ou de la ville ; pour que les décideurs puissent comparer son attractivité, les moyens qu’il met en œuvre pour « garder son rang », avec le site culturel dont ils ont la responsabilité, même tout petit.
POUR EN SAVOIR PLUS
L’enquête au complet de MUSEOSTAT : http://www.culture.gouv.fr/culture/politique-culturelle/MUSEOSTAT_2009.pdf
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NEWS
– Qui est le Touriste Culturel ? Quelle peut –être sa contribution à la reprise économique ? Quel est son profil ? Si les principaux acteurs de l’économie touristique, en France considère le sujet du tourisme culturel comme mineur, les canadiens et les américains eux, font des études et se bougent sur le sujet ! American Express a analysé les profils de la clientèle du tourisme culturel avec précision. Madame Beverly Anderson, vice-présidente d’AE, est intervenue de façon très pertinente à Pasadena en Californie du 16 au 18 janvier 2011, lors d’une conférence du ONE Travel Conference.Evènement relaté en ligne par le Réseau de veille en Tourisme de l’Université de Québec à Montréal(UQUAM) Voir l’article de la très savante Maithé Levasseur : http://veilletourisme.ca/2011/02/16/la-reprise-economique-et-le-touriste-culturel-compte-rendu-de-conference/
– Comment fabriquer un bon évènement culturel en milieu urbain ?
Un ouvrage à lire absolument : un grand classique sur les évènements urbains et culturels et mleruis relations avec le tissu urbain, économique, organisationnel : : Eventful Cities, Cultural management and urban revitalisation- 534 pages- Greg Richards et Robert Palmer – Copyright 2007 Butterworth-Heinemann Title – ISBN: 978-0-7506-6987-0 – Mots –clés : Analyses the process of cultural event development, management and marketing and links these processes to their wider cultural, social and economic context Provides a unique blend of practical and academic analysis, with a selection of major festivals and cities where ‘the event’ has had an important element of development strategy- Examines the reasons why different stakeholders should collaborate, as well as the reasons why partnerships succeed or fail
– Les Européens passent plus d’une journée par mois sur le Web : en moyenne, les Européens passent l’équivalent d’une journée par mois sur le Web. Néerlandais et Britanniques sont les plus gros consommateurs, avec respectivement 31 h 39 min et 30 h 38 min en ligne. A l’opposé, Italiens et surtout Autrichiens ne consacrent que 16 et 13 heures de leur temps en moyenne au Web. La France se situe très près de la moyenne européenne, avec un peu plus de 25 heures passées chaque mois en ligne.
http://www.journaldunet.com/ebusiness/le-net/internet-europe/temps-passe-sur-internet.shtml
KEN LE TOURISTE PARFAIT
Ken était dans son jet privé avec un cadeau pour son ex, Barbie, dans son sac, et souriait aux anges ( Notre photo)…En fait, il s’amusait beaucoup avec ses amis français, au téléphone ou sur Facebook, et là, on venait de lui prédire un score exceptionnel s’il se présentait aux présidentielles de 2012. C’est simple, d’après leur sondage Twitter, 99% de français à ce jour voteraient pour lui et le voyaient déjà Président, pas trop cool? Il but son jus de tomate tranquillement, Abu-Dhabi était à l’horizon, et il apercevait déjà, sous l’ aile de l’avion, la piscine de son hôtel. En bon touriste parfait, il allait encore faire de belles affaires avec ses amis des Emirats. Mais cette proposition de diriger la France le taraudait… Irait, irait-pas ?
Légende photo du haut:
Redémarrage au Moyen-Orient : Le Luxe français réalise déjà 8% de son chiffre d’affaire dans la région. Les marques, fédérées par le Comité Colbert, tablent sur une croissance, en 2011, de 5 à 6%, avec les 2500 points de vente du Moyen Orient. La faïencerie de Gien va installer une boutique, pour compenser le recul de son CA en France et en Europe. Le Dubaï mail ; ¼ de la surface commerciale des Emirates et 5 millions de visiteurs/an, est un lieu de rendez-vous et donc le shopping y a un rôle social..Van Cleef § Arpels, le bijoutier des princes de ce monde, va doubler son réseau. Le Qatar prend aussi la route du luxe, avec ses 78600 $/habitant, l’un des plus riches pays de la planète, avec ses réserves de gaz. (Infos : D.Chapuis les Echos 3 nov.2010, p.20.)