Avec malice, je constate que les professionnels de la culture ont quelque réticence pour associer ces deux termes, Economie et Culture, mais que, invariablement, tout candidat aux élections présidentielles qui promet de doubler le budget de la culture est assuré, en Avignon, de faire un tabac!
Plus sérieusement, les contenus culturels sont « excellents », en France, où nous avons l’offre la plus conséquente du monde, grâce sans doute à cette mission de service public qui la soutient. Le maillage du territoire est (presque) total, et pas une année ne passe sans qu’un nouveau festival ne soit créé, ou encore un nouveau musée, un master d’enseignement artistique, des expositions, dans les villes et leurs groupements, les départements ou les régions. Enfin cette abondance n’est pas, comme il est dit trop souvent, une charge lourde pour les contribuables, puisque le seul domaine du patrimoine produit 15 milliards de retombées annuelles (Vous avez bien lu !). Google Art ou WiKi Loves Art ont d’ailleurs bien compris tout l’intérêt des contenus culturels , qu’ils transforment en vitrines prodigieuses de leurs entreprises.
Et pourtant, pour présenter tout cet ensemble réjouissant, ou pour en évaluer les stratégies, nous sommes faibles. Nous ne disposons que de très peu de repères ou de chiffres, et les données à disposition ou gratuites datent très souvent, y compris pour l’Etat, les Régions, les Départements, de …l’année 2007 ! Soit juste avant une crise qui a chamboulé le paysage, et à l’aube d’une une réforme territoriale qui n’a pas pour ambition de clarifier les compétences entre les différents échelons territoriaux.
Bref, tracer le cadre social, économique et stratégique où s’insère la Culture sur notre territoire, créer une base fiable pour réfléchir et proposer des pistes pour l’avenir est bien difficile, et mieux vaut s’adresser à des experts canadiens, américains et anglais – qui disposent de statistiques très utiles sur la France ! -, ou se rapprocher de grandes entreprises qui ont aussi besoin de ce type de données et y mettent des moyens. Pour faire un portrait du Tourisme Culturel qui soit le plus « actuel » possible, j’ai enfin découvert une petite perle, en matière de ressources de qualité, que je vous présente aujourd’hui. Il s’agit d’un site Internet riche d’études remarquables, que je conseillerai aujourd’hui à tous les amateurs ou experts de Culture et de Tourisme : celui du Forum d’Avignon.
I – LA VEILLE DU FORUM D’AVIGNON: le site Internet du Forum comporte principalement
– 1 – Une veille web internationale sur son espace « CULTURE IS FUTURE » , avec des des articles qui présentent des innovations (financement, numérique, attractivité des territoires) venues de tous les continents.
2 – Des études internationales en ligne : publications, mises à disposition en téléchargement libre sur le site Internet, dont celle d’INEUM dont nous vous avions déjà fourni l’adresse dans un précédent billet. Des interviews , préparés tout au long de l’année pour préparer les débats et donner des angles de vues différents (parole aux artistes, aux entreprises, etc …).
3 – Enfin une newsletter mensuelle prépare les participants à la rencontre annuelle du Forum . Le Forum s’est en effet placé officiellement sur le terrain du débat international, mais il s’agit, d’après ce que l’on peut en lire, d’un Club d’excellence dont les participants sont des personnalités influentes ( deux ministres…). La liste des participants est très variée, composée d’artistes, (cinéastes, écrivains, peintres..), de chefs d’entreprises, de philosophes ou d’économistes (Philippe Lemoine, Paul Andreu, Hortense Archambault, Jean-Jacques Annaud ; Jean Nouvel, Bernard Stiegler ; Françoise Benhamou, Hélène Darroz, Bertrand Lavier, Marjane Satrapi, Régis Warnier…).Cet ensemble doit, sans aucun doute, profiter de sa diversité. (Voir la liste)
II– UNE ENTREE POUR LES CREATIVE CITIES Nous évoquons très souvent sur ce blog la révolution que représentent les façons de travailler des Creative Cities, nées il y a plus de dix ans et dont Greg Richards et Robert Palmer ont théorisé à plusieurs reprise l’histoire et les projets attendus. Le site du Forum comprend aussi une entrée pour ces villes creatives : « Concernant les Creative cities et l’attractivité culturelle des territoires, ce thème fait partie de nos fils rouges pour mieux comprendre les interactions, au niveau local, entre culture et économie », nous a répondu très aimablement la Directrice Générale du Forum, Laure KALTENBACH, suite à un petit courrier que nous avions adressé au Forum pour les féliciter de leurs ressources, et en savoir plus . Laure Kaltenbach nous a aussi résumé le rôle de l’ équipe du Forum : il s’agit d’une petite équipe, qui sert le projet de « laboratoire d’idées, et travaille sur les liens entre la culture et l’économie au niveau international ».
Le classement des métropoles internationales figure donc en bonne place : (Foreign Policy, A.T.K./Chicago Council on Global Affairs)Le classement des métropoles internationales (réalisé par Foreign Policy, A.T. Kearney et le Chicago Council on Global Affairs) analyse et compare le rayonnement de 65 villes à travers le monde, prenant en compte leur influence, leur intégration aux marchés mondiaux, leur vie culturelle et leur capacité à innover.
III- DES AVIS CROISES SUR ECONOMIE ET CREATIVITE
– Interview de David Throsby, professeur, University Macquarie
– Quel est le lien entre la croissance/performance économique et la créativité? DT : « Il est de plus en plus évident que la créativité est indispensable à la promotion de l’innovation au sein du secteur économique. Les idées créatives sont un ingrédient essentiel de l’innovation du produit et du processus, et ces types d’innovation conduisent à un changement technologique, qui à son tour alimente la croissance économique. Ainsi un lien entre la créativité et la performance économique des entreprises et des économies en général est établi. Les industries culturelles ont un important rôle à jouer dans la création d’idées nouvelles. Si nous pensons les industries culturelles comme un système où les arts créatifs se situeraient au centre, nous commençons à comprendre comment les artistes et les organisations d’art génèrent des idées qui sont par la suite diffusées par les industries créatives à travers les films, les médias, l’édition, la mode et le design et contribuent à l’innovation à la fois dans le secteur des industries créatives et dans le secteur économique en général. De plus, les travailleurs créatifs qui ont eu une formation artistique ont eu une mobilité telle qu’ils appliquent leurs talents et compétences dans d’autres industries, qui peuvent être loin du secteur culturel, comme la manufacture ou les services financiers. Toute économie qui cherche à maximiser son potentiel d’innovation devrait entretenir son secteur culturel, et en particulier assurer la santé et la durabilité des arts créatifs même, où les idées émergent et où les personnes créatives acquièrent compétences et expérience »
– Interview de Kjetil Thorsen, architecte, Snøhetta
– Pourriez-vous nous donner votre définition de l’investissement culturel ? K.T : « Pour les projets culturels comme pour les autres projets architecturaux, la notion d’investissement peut être déclinée selon les différents cycles du projet, où ce qui compte à un moment donné, va varier dans le temps. Chaque projet s’inscrit dans un triangle constitué de trois variables (planning triangle) : le facteur temps, la qualité et l’argent. Selon l’état d’avancement du projet, ces trois variables vont occuper la première place et l’emporter en importance sur les autres. Au début du projet, la qualité est en tête des priorités, puis le facteur temps devient décisif avant que l’argent soit prioritaire in fine, au moment où l’on consomme son budget dans la réalisation proprement dite du bâtiment. Le facteur temps réapparait à la fin quand on finalise la construction.Il ya donc une séquence dans chaque projet qui explique l’investissement. La gestion opérationnelle de cette succession conditionne le succès du projet. Selon les ambitions et les objectifs de chaque projet, certains éléments vont l’emporter : l’aspect financier dans les projets commerciaux ; le facteur temps pour certains bâtiments publics, par exemple lors de la construction d’un hôpital où des délais réglementaires sont imposés; la qualité, qui caractérise les projets culturels. »
IV – UNE PORTE ENTR’OUVERTE SUR LES STRATEGIES TOURISTIQUES et CULTURELLES qui sont aussi abordées grâce à la mise en ligne du Rapport de Bernard Plasait : Améliorer l’image de la France (Rapport du CESE 2010, que nous vous avions présenté, comme l’Etude INEUM, sur ce blog.). Lire la présentation et le Rapport de Bernard Plasait .
V – UNE NOUVELLE ETUDE MISE EN LIGNE LE 17 NOVEMBRE PROCHAIN: Entreprendre et investir dans la culture : de l’intuition à la décision : Cette étude internationale, de Kurt Salmon, identifiera le cadre de référence à l’attention des décideurs et les critères culturels, économiques et qualitatifs qui prévalent dans la décision en faveur des investissements culturels, qu’ils émanent d’acteurs publics ou privés. Elle s’est appuyée sur des éléments de terrains collectés auprès de décideurs publics et privés, de porteurs de projets, d’artistes et de créateurs, ayant été mobilisés autour de projets et événements (environ 80 entretiens). L’étude comportera une analyse économétrique pour identifier l’effet de levier des investissements culturels de la dépense culturelle publique sur la hausse du PIB, à partir des données de 21 pays et pour 47 territoires (Tera Consultants et Kurt Salmon lors des éditions 2009 et 2010 du Forum d’Avignon).Une seconde enquête la complètera, qui reposera également sur des interviews et sera menée par Charles Landry, sur l’investissement culturel de 6 villes : Lille, Bologne, Bilbao, Cracovie, Liverpool et la région de la Ruhr./
KEN LE TOURISTE PARFAIT Ken était toujours fou de joie quand, entre deux avions et quatre rendez-vous d’affaire, il prenait quelques vacances dans un palace, en bon touriste parfait. Il savait que l’on guettait son « panier moyen » de milliardaire, mais peu lui importait, pensait-il en sirotant un petit vin blanc dans le Grand Salon du Danieli, à Venise…Il attendait son ex, Barbie, et Le Petit pour quelques jours . Ils iraient revoir la belle Madona de G.Bellini à San Zaccaria, qui lui avait tant plu, il y a trois ans… Un appel de Barbie sur son portable lui fit poser son verre sur la marquettterie du guéridon : Barbie s’était trompée de « Venise », et avait failli faire le tour du monde, lui disait-elle, pour le rejoindre : d’accord, il lui avait dit « Venise »! Mais laquelle? Après un tour à la Venise de Las Vegas, elle l’avait cherché à Macao, puis à la Nouvelle Venise, Dubai, que lui avait recommandé l’Office de Tourisme de Macao…Pauvre chérie, elle était rincée, mais l’appelait du bateau–taxi privé qui la conduisait vers le Danieli…
Voir les Venise de Barbie : à Dubai, à Macao, à Vegas, à Las Vegas, et la vraie Venise, enfin pour les européens, Venise aujourd’hui truffée de technologies, et, avec la wi-fi aux abords du Grand Canal, on ne peut plus se perdre à la Biennale, chic!