Aujourd’hui, je vous présente quelques les bonnes idées qui fleurissent depuis quelques semaines pour « repenser le musée » , c’est à dire la place que les musées peuvent/doivent prendre dans la reconstruction post-covid pour y porter des valeurs de partage de la connaissance, de solidarité, de proximité, de soutenabilité. – De toute évidence, les professionnels français mais aussi du monde entier veulent changer beaucoup de choses, mais veulent aussi d’autres avis : partenaires et visiteurs seront sollicités pour reconstruire ce musée de demain !
J’ai donc pensé à vous, chers lecteurs, étudiants ou professionnels, amoureux de musées ou de experts en numérique ou en Tourisme : comment changer les musées, après ces longs mois de fermeture ? Quelles nouvelles idées pour le musée de l’après-crise, selon vous ? Je vous résume le beau compte-rendu de l’ICOM en pdf (90pages): « Et maintenant, reconstruire… Penser le musée “d’après”
I- LE MUSÉE NE POURRA PLUS ÊTRE COMME AVANT ?
-Quel rôle pour les musées, dans le monde de demain ? « Quels musées nous apprêtons-nous à rouvrir et quelle place la culture, dont les musées sont le symbole, prendra-t-elle dans la société déconfinée ? » Hélas, quelques musées fermeront, n’ayant pas pu, faute de fréquentation, résister au choc économique sans les revenus habituels (mécénat, billetteries, boutiques, librairies). C’est le cas pour quelques musées des pays où la culture a très peu de subventions publiques (USA, Royaume –Uni, Pays du Nord de l’Europe, Australie…) ou de musées privé. La chute des revenus des musées du monde atteint 75 à 80 %, comme nous l’avons déjà indiqué dans ce petit blog pour les musées américains .
– Ce qu’il faut garder des musées d’aujourd’hui! : les missions du musée semblent pour tous inamovibles car utiles, et les professionnels entendent privilégier leurs liens avec la société. Très vexés par la décision française de les fermer au motif qu’ils n’étaient pas « essentiel » », les musées ont protesté en se revendiquant comme des « acteurs-clés du lien social »,et leur rôle de conservateurs de l’histoire, des œuvres d’art ou d’histoire naturelle est extrêmement utile à la mémoire de toute nation. Tout comme leur appui aux artistes et à la création (musées de design ou d’art contemporain…) et leurs partenariats avec les relais des jeunes (Education nationale ou autres). Leur rôle de transmission, de médiation culturelle et d’éducation est important!
II- L’ÉCORESPONSABILITÉ, avec RÉVEIL CULTURE, nom d’un jeune collectif d’étudiants qui travaille à rassembler les professionnels de la culture sur la transition écologique contre les risques sanitaires et climatiques, migratoires, alimentaires à venir. Dans un monde où les pratiques vertueuses pour protéger l’environnement et éviter à notre planète de s’enflammer, certaines pratiques ne seront plus souhaitables : limiter le réchauffement à 2°C, d’ici 2100 est aussi l’objectif des professionnels de la culture.
♦Le Manifeste pour un Réveil écologique de la culture, en ligne le 27 janvier. Extraits : » La culture et les loisirs sont la troisième cause de mobilité des français et la moitié des 87 millions de touristes internationaux que nous accueillons. Un festival qui sert 50 000 repas avec de la viande a la même empreinte carbone que 100 français en une année. Et pourtant la question environnementale est absente des budgets (écologie, énergie, climat). Il est temps de changer ! Mutualiser les moyens, réduire le temps de préparation des expositions, amorcer une sobriété numérique, nourrir autrement nos équipes, éco-concevoir les œuvres et réinventer nos modes de diffusion : rendez-vous le 15 février prochain pour imaginer la culture de demain! Retrouvez le Manifeste , pétition au ministère de la Culture, ICI!
III- DIMINUER le nombre d’EXPOSITIONS TEMPORAIRES qui consomment des budget considérables (Transports/assurances), avec des œuvres que l’on va chercher au bout du monde par avion (une œuvre par avion si c’est un Picasso ou un Rembrandt…) , œuvres accompagnées dans leurs voyages de personnels techniques et des conservateurs, restaurateurs, administrateurs ou directeurs de musées. « Il n’y a pas de recette miracle. Il y a sans doute quelques idées clefs. La première est qu’un musée doit raconter une histoire. Cela se traduit par l’opposition régulièrement faite entre expositions temporaires et expositions permanentes, les secondes consommant l’essentiel des moyens des musées et attirant les fréquentations les plus considérables. » Hervé Barbaret –
IV- LE NUMÉRIQUE ET DE NOUVEAUX PUBLICS , que les réseaux sociaux mobilisent les visiteurs sur tous les sujets, et en particulier l’offre muséale, œuvres ou objets de collections complètes qui défilent sur nos portables, , « Au point que certains s’interrogent sur le retour des visiteurs dans des salles qu’ils ont pris l’habitude de fréquenter depuis leurs canapés ».
La fréquentation des musées a été paralysée par les confinements et mesures sanitaires ou interdictions d’ouvrir, depuis un an, avec des résultats catastrophiques : – 82 % de visiteurs pour Versailles,- 77 % à Orsay, 72 % pour le Centre Pompidou, – 60 % au Grand Palais, – 66 % au château de Fontainebleau… – 54 % pour les musées de la Ville de Paris.
- Par contre les filières du Numérique ont accompli des merveilles ! Des stratégies digitales ont vu le jour, pour mieux communiquer avec les publics – coucou, Cyril Leclerc! – et les publics sont venus en ligne! ⇒Collections en ligne, expositions virtuelles, ambassadeurs, conférences ZOOM, blogueurs, collections en 3D, en HD, gaming, Visite virtuelles 3D, jeux en ligne, podcasts, réseaux sociaux, tutos, vente aux enchères en ligne… Les résultats sont au rendez-vous, selon le Quotidien de l’art : 22 000 écoutes de podcast (Musées de la Ville de Paris) ; 100 000 visites virtuelles cumulées des expositions ; 2,5 millions de téléchargements d’images d’œuvres en haute définition ; + 250 % de vues sur les chaînes YouTube et Dailymotion… Les vidéos du Centre Pompidou en 2020 ont eu plus de 3 millions de vues, + 500 % d’abonnés sur YouTube. Au Grand Palais, la visite virtuelle de l’exposition « Pompéi » a comblé 1,3 million de personnes. Le site du Louvre cumule 21 millions de visites » « Les musées fermés partent à la chasse de nouveaux publics », dit l’excellent article du 25 janvier de Sarah Hugonenq (Le Quotidien de l’art), article à lire ICI .
V- MOINS DE DÉPENSE, MOINS DE PUBLIC : de MEILLEURS MUSÉES ?
Quel musée sommes-nous en train de reconstruire ? Ce modèle de circulation intensive d’œuvres ou d’ expositions et le renouvellement permanent des expositions temporaires est considéré comme un modèle « productiviste »qui a sans doute atteint ses limites :voyages en avion et empreinte carbone et coûts importants ne sont plus souhaitables. - -Dans Le Journal des Arts, Jean-Christophe Castelain a fait des propositions pour réinventer le musée. dont celle de renouveler périodiquement et en profondeur l’accrochage des collections
- Revoir les modèles économiques : François Quéré, directeur du développement des publics et de la communication chez Universciences considère que les publics sont déjà disposés à payer pour un contenu numérique comme un podcast.
- la place que les musées peuvent / doivent prendre pour porter des valeurs de partage de la connaissance, de solidarité, de proximité, de soutenabilité. A nous, professionnels de musées, de dessiner et proposer cette place des musées.( https://icom.museum/fr/nos-actions/role-social-des-musees/developpement-durable-et-local/)
VI- ASSOCIER LES PUBLICS A LA RÉFLEXION et aux Démarche de Demain !
Voilà la vraie question et ce pourquoi je voulais vous prévenir si vous voulez participer. Une vraie bonne nouvelle, cette question, car depuis les fameux éco-musées, qui profitaient des compétences des habitants pour avancer, on a peu vu les musées s’engager vraiment sur un travail collaboratif, participatif. Redonner la parole aux publics, comme le fait le directeur des musées métropolitains de Rouen Normandie, Sylvain Amic, est vraiment intéressant car les défis sont nombreux :
– Comment associer le public sans démagogie ? Entre Musée et habitants, comment recréer du lien ? – Comment inclure dans le travail des musée la notion de « Communs » à partager ?
– Comment poursuivre les régénérations qui avaient commencé avant le COVID : la question du genre et de la diversité dans les musées (collections , expositions..équipes des musées et directions) ; la question de la restitution des oeuvres d’art prises à nos anciennes colonies (Cf. Le rapport Sarr-Savoy et ses recommandations sur les restitutions des biens culturels de l’époque coloniale provenant d’Afrique subsaharienne)?
– Comment éviter le danger du repli local : Francoise Benahmou, notre grande économiste de la culture, Professeur des universités et membre du Cercle des économistes, évoque aussi le danger du « repli sur le local ». (A voir ICI, page 38) :
« Le terme « local » est séduisant, mais il faut prendre garde au repli national, voire nationaliste, qu’il peut impliquer. Ce qui fait la force de la culture, c’est aussi la capacité d’accueil. […]Le local, cela signifie aussi des retombées économiques plus circonscrites, moins générales, car, comme on le sait, plus le visiteur vient de loin, plus il dépense. On évoque de même un repli sur du « plus modeste », moins coûteux et plus vertueux pour l’environnement. Mais si l’on s’engage dans cette voie, il faut être attentif à ne pas dégrader la qualité, la circulation des œuvres, la variété de l’offre muséale. Les musées doivent relever des défis sans précédents à partir des nouvelles attentes des publics, de la promotion de la diversité, du changement climatique, du développement durable, de la protection du patrimoine. La crise sanitaire rend plus complexe encore ce qui l’était déjà. »
POUR EN SAVOIR PLUS /
1- Les musées français fermés à la chasse de nouveaux publics Par Sarah Hugounenq dans le Quotidien de l’art- Édition N°2092 – 25 janvier 2021 2- ICOM, LE RAPPORT Et maintenant… Reconstruire. Penser le musée ”d’après” PDF
– Programme complet de la journée de réflexion du 25 septembre 2020
3-La présentation du Rapport de cette journée, ICI.
– CHIFFRES MONDIAUX du Rapport : « Près de 95 % des musées au monde ont dû fermer leurs portes. Des milliers de professionnels ont été licenciés ou mis au chômage technique et les consultants indépendants, en grande partie des jeunes compétents et motivés, sont les plus vulnérables. Plus alarmant encore, 13 % des directeurs ont déclaré que leur institution pourrait ne pas survivre au confinement et fermer définitivement (page 23 du pdf) Globalement, avec des différences régionales, au moins 85,3 % des musées dans le monde ont fermé leurs portes à cause de la pandémie. En fonction du stade d’évolution de la crise, ce pourcentage a été moins fort en Asie, Afrique et dans les pays arabes. S’agissant des personnels, 82 % des établissements ont déclaré que 75 % d’entre eux ne travaillaient pas au musée au moment de l’enquête. Dans 13 % des cas, en raison du confinement, les employés avaient été mis au chômage partiel et dans 6 % des cas licenciés, ou non renouvelés pour ceux qui étaient sous contrat »
4- ICOM France Le comité national français d’ICOM – ICOM France –rassemble plus de 5300 membres institutionnels et individuels venant de toutes les disciplines : beaux-arts, sciences et techniques, histoire naturelle, écomusées ou musées de société. Les musées rapprochent les cultures et les générations, nourrissent les émotions et le plaisir d’apprendre. Ils doivent aussi repérer, ce qui demain, fera trace de notre culture d’aujourd’hui. ICOM France est résolument au service de ses membres pour accomplir ces missions et les accompagne dans l’exercice de leurs métiers. ICOM France 13 rue Molière – 75001 Paris – Tel. : 01 42 61 32 02 icomfrance@wanadoo.fr – www.icom-musees.fr
AUTRES SOURCES : Revues internationales d’art , interviews, Revue ICOM Suisse, Art News, beaux-Arts Magazine, Le Journal des Arts, etc…Et, pour la France, l’ICOM (Conseil International des musées , le réseau des musées du monde créé en 1946, qui compte 50 000 membres aujourd’hui répartis dans 135 pays, dont la France. ICOM France a donc fait en septembre dernier une première séance professionnelle de réflexion (25 septembre de 9h à 13h ! “Et maintenant, reconstruire… Penser le musée d’après”, la matinée du 25 septembre fut consacrée dont voici le pdf de compte-rendu, très clair.
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KEN LE TOURISTE PARFAIT était un peu inquiet… En télé-travail depuis ses mois, Ken prenait souvent un petit café au bord de sa piscine intérieure de leur villa de de Los Angeles. Il entendit des rires près du bar et se rapprocha, et là, sa tasse lui tomba des mains! Il se figea comme une statue : devant lui, Barbie Chérie et son amie, habillées de rouge, chantaient …l’Internationale à tue-tête! « Voilà, pensa-t-il, les désordres de ce fichu virus : les femmes deviennent folles…Dès qu’il fut parti les filles se regardèrent « On lui dit ou pas? » En fait elles étaient était devenues de vraies FFM, Fans frustrées de Musées, et allaient manifester ce jour devant celui d’art, fermé…Cette chanson était parfaite, et elles espéraient que les flics seraient chous…
NOS PHOTOS
— Paul Gauguin — Nave nave mahana-Œuvre de 1896- appartenant au musée des Beaux-Arts de Lyon – Avec l’aimable autorisation du musée des Beaux-Arts de Lyon Hauteur : 95 cm ; Largeur : 130 cm
– Domaine public
– Claude Monet, Mer agitée à Étretat (1883). Domaine public : 100 cm ; X 81 cm
1 Commentaire
Bonjour Madame Lehalle,
Tout simplement Merci pour ce partage.
Bien cordialement,
Brahim Djellouadji
Méditerranée Évents & Travels
Marseille,
Alger.