Cédric Néau : Le patrimoine immatériel est encore négligé par les pouvoirs publics

Attendez vous a l inattenduL’économie touristique va-t-elle bien? Le paysage culturel est-il en pleine forme? Non, me direz-vous, et pourtant le tourisme culturel attire toujours et encore nos habitants et les touristes étrangers. Mais la concurrence est bien là, et au niveau mondial nous déclinons un peu plus chaque jour, faute d’agilité. Hier, divine surprise, Cédric Néau a écrit dans la Gazette des Communes un article très étonnant sur la place du patrimoine immatériel dans les politiques publiques : « Le patrimoine immatériel est encore négligé par les pouvoirs publics ». Étonnant car au lieu de souhaiter un développement de ce qui existe, au lieu d’en appeler à la création d’ un nouveau et coûteux pansement – Comité, Assises Nationales, Haut Conseil… ou toute autre usine à gaz d’une inefficacité parfaite dont nous avons le secret – Cédric Néau fait une analyse revigorante, à partir d’un état des lieux qu’il connait remarquablement. Nous partageons ses avis : oui, l’UNESCO a changé son fusil d’épaule, et encouragerait bien tout ce qui bouge à la seule condition qu’un dialogue entre Touristes et Habitants fasse partie de tout projet! Oui, le tourisme «  »prédateur » arrive en fin de course, droit dans le mur.Oui, les Greeeters, si souvent attaqués, inventent un discours non-institutionnel qui parle librement aux visiteurs ! Oui les « villes participatives » ne sont pas un simple effet de mode, mais une réalité à Nantes ou à Lyon, à Lille et surtout ailleurs que dans notre pays!Et sont bien des recours tangibles à la baisse de la fréquentation du patrimoine classique repérée par Cédric Néau, aux surcapacités de charge d’un petit nombre de sites culturels et donc à l’absence concrète de mobilisation des élus sur ces sujets.
Nos politiques actuelles, pour le tourisme culturel, méritent sans doute un carton rouge, tant elles ignorent les nouveaux comportements des visiteurs. Abandonnant les incantations ordinaires et des condamnations faciles des modèles étrangers, Cédric Néau a trouvé un bon moyen de nous sortir des chemins d’impuissance : réfléchir aux enjeux réels du patrimoine immatériel dans l’économie touristique et, pourquoi pas, passer sérieusement à des décisions politiques : je lui laisse la parole, avec un grand MERCI à lui pour ce beau texte!

 LE PATRIMOINE IMMATÉRIEL EST ENCORE NÉGLIGE PAR LES POUVOIRS PUBLICS

Un article de C. Néau, publié le 31/10/2013 dans La Gazette des Communes (Ed. Territorial, Groupe Le Moniteur

visuel_patrimoine_immateriel_small Le tourisme présenté comme un opportunité de développement peut être aussi un prédateur économique et vécu comme une activité parasite pour les habitants d’un territoire. Peu à peu, les acteurs institutionnels et privés changent de paradigme pour développer des projets plus participatifs, durables et tournés vers l’expérience. Au centre de ces nouvelles préoccupations : la patrimoine immatériel, qu’il reste encore à valoriser.
En France, onze éléments ont déjà été inscrits au patrimoine immatériel de l’Unesco dont le repas gastronomique, le chant corse, la dentelle d’Alençon, le Fest-Noz, le compagnonnage ou l’équitation de tradition française. L’Hexagone a également déposé à l’Unesco deux autres dossiers, celui des ostensions limousines (exposition de reliques de saints locaux escortées tous les sept ans par des dizaines de milliers de personnes) et celui du gwoka (ou gwo ka, percussions guadeloupéennes). « Malheureusement ce patrimoine immatériel est très peu mis en valeur », regrette sur son blog Evelyne Lehalle, directrice de NTC (Nouveau tourisme culturel). « C’est pourtant notre art de vivre qui attire 80 % des visiteurs », poursuit-elle.

festival livre culinaireL’avènement de la prosumption – Les tendances de consommation actuelles pourraient encore accroître cette proportion. « Aujourd’hui, grâce au web 2.0, les touristes pratiquent de plus en plus la prosumption, c’est-à-dire qu’ils créent eux-mêmes les produits touristiques qu’ils consomment par l’agrégation de conseils, de packaging personnels, de bons plans glanés sur la toile, etc. » analyse Sébastien Jacquot, maître de conférence à l’IREST à l’université Paris-1 Panthéon-Sorbonne.

Ces visiteurs-acteurs cherchent ainsi de plus en plus d’expériences à partager avec les habitants. A New York, certains n’ont pas hésité dans les années 90 à aller à leur rencontre pour jouer les guides personnels le temps d’un séjour. Ils sont devenus ainsi des greeters, un concept repris aujourd’hui en France dans une trentaine de villes.
(sources : France Greeters Federation).

Des habitants-ambassadeurs – Réunis en associations, les greeters sont soutenus par les offices de tourisme locaux qui voient en ces habitants les meilleurs ambassadeurs d’un territoire et d’un art de vivre.
« C’est un bon moyen d’éviter de transformer les habitants en simple relais d’un discours territorial produit par les institutions », se réjouit Sébastien Jacquot. A l’heure où les recettes touristiques manquent à la France, la promotion du tourisme d’expérience, via le patrimoine immatériel et l’implication des habitants dans le marketing territorial, constituent une vraie opportunité de croissance.La carte des Greeters en France : carte-greeters

images (1)Une association à peine émergente – Les pouvoirs publics semblent en avoir pris conscience et veulent donner au patrimoine immatériel une visibilité encore absente aujourd’hui par rapport aux sites classés. Onze lauréats ont ainsi décidé de se regrouper en association, dont le but est de « faire connaître la convention de 2003 pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel, de valoriser ce patrimoine et d’organiser un réseau d’acteurs », a expliqué sa directrice, Séverine Cachat, embauchée par le ministère de la Culture et directrice depuis 2011 du Centre français du patrimoine immatériel, ex-maison des cultures du monde, basée à Vitré (Ille-et-Vilaine).

Une belle façon de rebondir pour cette structure qui a vu son budget amputé d’un tiers cette année, pour cause de restrictions budgétaires, et qui se bat aujourd’hui pour trouver de nouvelles sources de financement, notamment auprès des collectivités locales.

th (1)L’Unesco se saisit du dossier – L’Unesco a également pris conscience de l’importance de son offre touristique immatérielle. l’organisation internationale craint en effet la surchauffe touristique des sites déjà classés. Aujourd’hui 981 sites figurent au patrimoine mondial, mais un quart d’entre eux a déjà fait l’objet d’un rapport sur l’état de conservation, le signal d’alerte en langage Unesco.

Pris entre le phénomène de sur-fréquentation des sites inscrits et la promotion du classement, l’Unesco préfère donc miser sur l’amélioration de la qualité de l’offre touristique des sites, via notamment le patrimoine immatériel, plutôt qu’à l’allongement sans fin de la liste des inscriptions. Et cette stratégie passe forcément par la participation et l’implication des habitants.

Villes participatives – « Nous devons contrebalancer l’effet des villes-musées pour créer des villes participatives, il faut réévaluer la notion de rencontre avec les habitants par la promotion du patrimoine immatériel », résume Maria Gravari-Barbas, chercheuse à l’IREST, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, lors du 4e séminaire de la chaire Unesco « Culture, tourisme, développement » (1).

La solution passe d’autant plus par la valorisation de la relation humaine que les habitants vivent plus souvent le tourisme comme une activité parasite que comme une opportunité de développement : « Il faut faire en sorte que le tourisme ne soit pas vécu comme une charge par les habitants des sites visités mais un bénéfice. Si ce n’est pas le cas, alors ce tourisme n’est plus acceptable », reconnait Kishore Rao, directeur du Centre du patrimoine mondial.

images (5)Une prise de conscience qui a un impact sur les modèles économiques des sites – Les sites eux-mêmes veulent désormais intégrer le tourisme dans un projet de développement économique et social local. Mais les obstacles sont nombreux.

En France, les sites menacés de surfréquentation et soucieux de préserver la qualité de vie des habitants se sont regroupés en 2000 dans le réseau des Grands sites de France. Ce regroupement associatif comprend une quarantaine de sites, comme les baies du Mont-Saint-Michel et de la Somme ou le Pont du Gard ; la plupart sont détenteurs d’un label, délivré par le ministère de l’Ecologie et du Développement durable.

Ce label, intégré au code de l’Environnement depuis la loi Grenelle 2 du 12 juillet 2012, récompense en fait une démarche de préservation du site en intégrant le plus possible les acteurs locaux. Le consensus est parfois difficile à trouver, comme l’a montré la forte opposition des opérateurs touristiques, mais aussi des élus, à l’aménagement du dispositif de délestage du site du Mont-Saint-Michel, mis en service le 28 avril 2012.

Les professionnels redoutaient une baisse de l’activité, qui a bien eu lieu. Selon les Monuments de France, la fréquentation touristique avait ainsi chuté de 16,5 % en journée en juin 2012 et de 9 % en juillet. Un an plus tard, c’est la municipalité qui est montée au créneau pour demander « à l’Etat et aux collectivités de mettre les moyens financiers supplémentaires nécessaires à un accès populaire et efficace» au mont.

—-POUR EN SAVOIR PLUS VOIR L ‘ARTICLE  COMPLET de Cédric Néau ICI, pour mieux profiter des liens et  de la vidéo! Et lire l’ouvrage de Chiara Bortolotto, « Le patrimoine culturel immatériel. Enjeux d’une nouvelle catégorie« , Maison des Sciences de l’Homme, 2011, ISBN : 9782735114177.

Chiara Borletto _

Cité ParadisKEN LE TOURISTE PARFAIT  Ken en ces jours de Toussaint, avait rendez-vous au Paradis! Enfin à la Cité Paradis, à Paris, ou start-up etde bien-nommés  business angels  partageaient de douces aventures numériques. Leurs critères secrets pour investir? « Voir et prendre la vague avant les autres », disait son ami Jean-David (Chamboredon).Ravi de la formule, il la répéta à Barbie, son ex, qui lui rétorqua que non, elle ne l’accompagnerait pas, que oui, son Job de Touriste Parfait l’agaçait sérieusement, avec toutes ces valises à (faire) préparer, pour des voyages incessants, des avions jamais à l’heure, des hôtels  et pas toujours palaces , des poireautages pendant ses rendez-vous d’affaires. Bref, elle,  Barbie, disait niet! et n’en serait pas. Ken, en  « responsabilité », comme notre Bon  Président français aimait à le dire, laissa l’orage passer…Mais pourquoi cette petite lassitude, Barbie Chérie? Que ferais-je sans toi, etc…etc…Entre trois sanglots, Barbie expliqua TOUT Je croyais qu’on allait voir mon amie Vanessa, voilà! 

 

1 Commentaire

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    • Muzeau sur 3 novembre 2013 à 17 h 41 min

    Bonjour

    Totalement sur la même longueur d’onde que vous…
    Les discours convenus ont vécu, grâce aux nouvelles technologies, on peut réinventer la valorisation de ce patrimoine immatériel en faisant intervenir ses acteurs !
    http://histoiredeson.over-blog.com/2013/10/du-patrimoine-immat%C3%A9riel.html

  1. […] Cédric Néau a écrit dans la Gazette des Communes un article sur la place du patrimoine immatériel dans les politiques publiques : « Le patrimoine immatériel est encore négligé par les pouvoirs publics .Cédric Néau propose de réfléchir aux enjeux réels du patrimoine immatériel dans l’économie touristique  […]

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