Ne rien cacher, regarder en face le Tourisme Culturel pour ce qu’il est : une activité parmi d’autres du Tourisme. Avec cependant un atout majeur : la Culture et l’art de vivre en France ont été plebiscités par 80% des touristes étrangers comme la principale l’attractivité de la France (Etude Maison de la France/IPSOS 2007). Ce passé culturel et surtout cette culture, indéfinissable, qui englobe TOUT ou presque, puisque nos paysages, nos petits cafés, notre gastronomie, l’oenologie ou notre sens de la fête font partie de la culture et de l’art de vivre.
– Face à ce flou des définitions , relire les études et les statistiques, voilà qui fait raison garder : si 80% des touristes viennent pour l’image « culturelle » de la France, seuls 17% d’entre eux fréquentent le patrimoine ; pour 28 millions de touristes à Paris, le Louvre, musée tout à fait exemplaire (et pas parce qu’il est riche et gros, mais parce qu’il a entièrement rénové ses pratiques !) n’a même pas la moitié de ces visiteurs.
Que fait le tourisme pour la culture ? m’e-mailait récemment un haut-fonctionnaire de la culture. « Oh, pas grand-chose, juste recevoir 82 millions de visiteurs, les loger, les nourrir, les orienter, faciliter leur activité et les faire voyager en toute sécurité… » ai-je répondu.
– Des solutions existent pour augmenter la fréquentation des lieux, des sites et des évènements culturels via les compétences du Tourisme. Des centaines des sites culturels les ont utilisées, ayant un service interne de Tourisme (Le Louvre; le Centre des monuments nationaux…). Ils savent répondre aux questions de base : Comment positionner un site culturel par rapport à ses voisins étrangers ou français, forcément concurrents? Comment actualiser notre offre, la sortir d’une relative banalité, l’Espagne, l’Italie ou Londres veillant à se différencier avec beaucoup d’allant ? Que proposer pour une première visite, à de nouveaux visiteurs ? Comment les fidéliser ? Des réponses ont été trouvées, et cela marche !
– Les freins au développement économique d’un territoire, via le tourisme culturel, viennent de ce manque d’appétit pour travailler ensemble, les objectifs des uns et des autres étant particulièrement différents. Eduquer les habitants/citoyens/de proximité, pour la culture, « à commencer par les français, » comme disait Malraux. Cette préférence nationale est bien sûr in-com-pré-hen-sible pour les acteurs du Tourisme, dont les mots irritent tellement ceux de la culture. Appeler une exposition temporaire un Evènementiel, augmenter les subventions publiques de flux financiers, aller au-delà de la « spécificité des publics empêchés » et des scolaires habitant la proximité (Prisonniers; Personnes handicapées; Personnes hospitalisées; personnes de zones urbaines et rurales défavorisées qui bénéficient de sept conventions entre leurs ministères et ce lui de la culture). Et enfin segmenter des clientèles étrangères, voilà qui forge, parmi d’autres, des incompréhensions entre professionnels de la culture et du tourisme. Mais rappelons que ces choix de la culture institutionnelle font partie, avec notre centralisation, d’une une exception unique en Europe, et sans doute unique au monde.
– Cette question de vocabulaire n’est donc que la partie visible d’un désaccord somme toute habituel : Intérêt Général, Publics-Les-Plus-Larges-Possibles, on doit, on « se » doit de « tirer les gens vers le haut », dans les professions culturelles, et toute modification de l’offre, toute proposition qui prendrait en compte les désirs, les souhaits des touristes autres que ceux de leur confort serait pure démagogie. La culture n’y perdrait d’ailleurs pas moins que « son âme » ! Diantre… Service Public contre entreprises privées des secteurs privés du Tourisme (Hébergement/Transport/Activités) ont pourtant tout intérêt, aujourd’hui, à cohabiter, ne serait-ce que pour participer, ensemble, au développement économique des territoires.
2009 est, dans ce paysage, une année intéressante pour revoir les dogmes et avancer. En posant les bonnes questions : comment la culture peut-elle « garder son âme, sa liberté, ne pas être instrumentalisée, etc… » tout en proposant des offres adaptées aux différents publics, ceux de la proximité et les visiteurs touristiques? Comment prendre en compte le travail et les compétences du Tourisme, au moins une année avant de mettre en chantier une expo temporaire ou l’ouverture d’un musée ?
Car 2009 et la crise n’offrent pas que des réductions budgétaires ou des opportunités de relecture de procédés anciens : il s’agit surtout, avec la transformation institutionnelle (redéploiement des professionnels de la direction du Tourisme, regroupement de Maison de la France et d’ODIT France, réformes attendues de la RGPP) de reposer calmement trois questions :
- Etes-vous satisfaits de votre fréquentation ?
- Combien de touristes recevez-vous par an ? Combien pourriez-vous en recevoir?
- Que faites-vous pour que leur accueil – avant, pendant et après la visite – soit le meilleur possible ?
Ces trois premiers billets présentent très rapidement notre point de vue, mais signent aussi l’arrêt des généralités. Ken est aux affaires, pour ce blog, vous avez vu son air radieux, et c’est lui qui abordera le rayon des nouveautés dès le prochain article : les TIC au service du Tourisme culturel – une très bonne surprise vous attend bientôt ! – ou le choix des thèmes des expos temporaires, avec la connaissance des publics/clientèles potentiels. Ces thèmes seront là la fête dans nos prochains billets ! A bientôt…
La blague du mois : pendant que Ken prend des vacances, so chic en Touriste Vert, le Centre Pompidou ouvre fin février neuf expositions sur thème du Vide. Les salles, désertes, retraceront l’aménagement du Vide par des artistes au cours des dernières décennies. N’a-t-on plus d’artistes à présenter ? Que nenni, cette expo, réalisée par le meilleur de nos professionnels-que-le-monde-nous-envie, est sans doute destinée plus particulièrement aux étudiants, aux intellectuels, aux fans de d’art contemporain (conceptuel, de préférence), soit plusieurs milliers de français et millions d’étrangers et à tous les curieux d’une vraie nouveauté! Le dossier de presse annonce, dans les salles désertes, un important dispositif pédagogique, pour accompagner des publics-les-plus-larges-possibles par des médiateurs. Comment les acteurs du Tourisme communiqueront-ils sur cet « évènement » : Venez à Paris, y’a Rien à voir ?
Voir aussi mon site professionnel : www.nouveautourismeculturel.com,
et pour m’écrire directement : evelyne.lehalle@nouveautourismeculturel.com